Le Ouija : entre mode inquiétante, planche à frissons et piège à amateurs de sensations fortes

Dans cet article, Karl Stephane, voyant et médium, lève le voile sur cette pratique qui revient à la mode mais qui cache de véritables dangers. Derrière la curiosité, les rires et les défis sur les réseaux sociaux, se cache une réalité bien plus sombre : chaque séance de Ouija ouvre une porte. Et quand on ouvre une porte sur l’invisible, on ne choisit pas toujours qui entre…

9/2/2025

Le Ouija : une porte dangereuse qu’il vaut mieux laisser fermée ou quand un "jeu" n’a rien d’innocent.

On entend souvent dire que le Ouija n’est qu’un simple divertissement, une curiosité sans danger qu’on sort lors des soirées entre amis pour se donner quelques frissons. Depuis que les réseaux sociaux l’ont remis à la mode, on voit des centaines de vidéos circuler : des adolescents rient nerveusement, des bougies s’éteignent toutes seules, des planchettes semblent glisser comme par magie. Pourtant, derrière ces rires et ces défis partagés en ligne, il y a une vérité plus inquiétante que peu de gens osent affronter : le Ouija n’est pas un jeu. C’est une porte, et une porte ne s’ouvre jamais sans conséquences.

J’ai rencontré de nombreuses personnes qui pensaient « tester pour voir », comme on essaie une application à la mode. Certaines venaient me consulter des semaines plus tard, le regard marqué, épuisées, me racontant qu’elles n’arrivaient plus à dormir, qu’elles entendaient des bruits étranges ou qu’elles avaient la sensation oppressante d’être suivies. Ces expériences, qu’elles soient réelles ou ressenties, avaient bouleversé leur quotidien. Le Ouija, par son apparence ludique, attire ceux qui cherchent à s’amuser, mais il attire aussi, et surtout, des présences qui n’ont rien de ludique.

L’histoire d’un portail

Pour comprendre le Ouija, il faut revenir à ses origines. L’idée d’une planche pour communiquer avec l’au-delà est née au XIXe siècle, à une époque où l’Europe et l’Amérique étaient fascinées par le spiritisme. On organisait des soirées entières consacrées aux tables tournantes, aux coups frappés par des esprits supposés et aux messages mystérieux qui semblaient surgir de nulle part. Cette époque, marquée par des guerres meurtrières et de nombreux deuils collectifs, avait rendu les vivants avides de signes venus de l’autre monde.

C’est dans ce climat qu’apparaît la planche Ouija, une invention à la fois ingénieuse et inquiétante. Plus besoin d’attendre des heures que la table bouge : il suffisait de poser une planchette sur un alphabet, de poser une question et de regarder les lettres s’aligner toutes seules. Le dispositif devient si populaire qu’il est rapidement breveté aux États-Unis, puis racheté par Parker Brothers, qui le commercialise au début du XXe siècle. Ironie de l’histoire : l’objet le plus redouté par certains médiums est alors vendu dans les mêmes rayons que le Monopoly. On pouvait, en une seule soirée, ruiner ses proches avec des hôtels rue de la Paix et, juste après, ruiner sa tranquillité en ouvrant une porte vers l’invisible.

Un fonctionnement trompeur

D’un point de vue scientifique, le Ouija serait expliqué par l’effet idéomoteur. Lorsqu’on se concentre et qu’on attend un mouvement, notre cerveau envoie inconsciemment de minuscules impulsions musculaires. La planchette bouge, mais personne n’en a réellement conscience. L’illusion est parfaite : on a l’impression qu’une force extérieure nous guide.

Mais cette explication n’est qu’une partie de la vérité. Car ce que j’ai observé dans ma pratique, c’est qu’une séance de Ouija crée bel et bien une ouverture. Les énergies de plusieurs personnes réunies se mélangent, formant une sorte de champ vibratoire. Ce champ agit comme un canal, une fissure entre notre monde et un autre. Et dans cette fissure, ce qui se présente n’est pas toujours ce que nous espérons. C’est un peu comme si l’on composait un numéro de téléphone au hasard. On espère tomber sur un ami, mais on peut aussi bien tomber sur un inconnu menaçant. Le Ouija, dans sa simplicité trompeuse, fonctionne exactement ainsi.

Les dangers invisibles mais bien réels

Le premier danger du Ouija est celui des esprits trompeurs. Beaucoup pensent qu’ils vont retrouver la voix d’un proche, un message d’amour venu de l’au-delà. Mais les entités qui se présentent ne disent pas toujours la vérité. Elles savent se faire passer pour qui vous voulez entendre. Elles imitent, elles séduisent, elles s’adaptent. Le piège est redoutable : on croit dialoguer avec un être aimé, on se laisse attendrir, et l’on ouvre son cœur. Puis le ton change, les réponses deviennent menaçantes, parfois obsédantes. Ce qui semblait doux et rassurant se transforme en une présence invasive.

Un autre danger, moins visible mais tout aussi inquiétant, est celui de la porte qui reste ouverte. Contrairement aux croyances populaires, dire « au revoir » en fin de séance ne ferme pas automatiquement le portail. Une fois la brèche créée, certaines présences s’y engouffrent et restent. Cela commence par des signes subtils : des bruits inhabituels, une sensation d’être observé, des cauchemars récurrents. Mais parfois, les phénomènes s’intensifient, et la maison elle-même semble changée. Les témoins décrivent des ombres, des déplacements d’objets, des sensations de froid glacial localisé. Et plus les habitants ont peur, plus l’entité se nourrit de cette peur.

Le danger ultime, celui que l’on retrouve dans les récits les plus sombres, est celui de l’oppression spirituelle, voire de la possession. Certaines entités cherchent à s’accrocher à une personne en particulier. Elles la vident de son énergie, influencent ses émotions, et parfois vont jusqu’à tenter de s’exprimer à travers elle. Les signes sont troublants : fatigue intense, colères soudaines, changements de voix ou de comportement pendant les séances. Ces cas extrêmes, que beaucoup jugent dignes de films d’horreur, existent pourtant réellement.

Même lorsque rien de surnaturel ne se manifeste, le Ouija reste dangereux psychologiquement. Après une séance, beaucoup développent une obsession. Ils rejouent sans cesse, interprètent chaque bruit comme un signe, chaque rêve comme un message. L’anxiété grandit, la peur devient permanente, et l’équilibre mental se fragilise. Des phobies, des cauchemars persistants, parfois même des dépressions apparaissent. Ainsi, même si aucun esprit ne s’est invité, l’ombre de l’expérience continue de hanter l’esprit du joueur.

Et il ne faut pas oublier les accidents très concrets. Une séance improvisée à la lueur des bougies peut tourner à l’incendie. Une panique collective peut provoquer des chutes, des blessures. Certaines personnes, persuadées de fuir une présence malveillante, se jettent dans des situations dangereuses. Le Ouija ne menace pas seulement l’âme, il peut aussi mettre en péril le corps.

Témoignages qui font réfléchir

Il existe des centaines de récits liés au Ouija. Certains sont exagérés, d’autres impossibles à vérifier, mais beaucoup méritent d’être entendus. Aux Philippines, en 2001, une vingtaine d’élèves jouaient dans leur école lorsqu’ils se sont mis à convulser et à s’évanouir les uns après les autres. Les autorités ont parlé d’hystérie collective. Pourtant, les témoins ont gardé la conviction d’avoir assisté à une véritable possession de masse.

Aux États-Unis, dans les années 70, une famille raconte avoir régulièrement utilisé le Ouija. Un esprit se présente comme protecteur et amical. Mais en quelques semaines, l’ambiance change. Des bruits violents résonnent la nuit, des griffures apparaissent sur les murs, des objets sont projetés sans raison. L’esprit qui se disait protecteur se révèle être oppressant. La famille, terrorisée, n’a eu d’autre choix que de quitter sa maison.

En France, dans les années 90, un groupe d’adolescents s’amuse dans une cave. La planchette épelle le prénom de l’un d’eux, suivi du mot « mort ». Quelques jours plus tard, il échappe de peu à un grave accident de voiture. Coïncidence ? Peut-être. Mais pour ceux qui étaient là, l’expérience a suffi à marquer leur vie entière. Aucun d’entre eux n’a jamais retouché au Ouija.

Pourquoi le Ouija séduit-il autant ?

Malgré ces récits inquiétants, la planche continue d’attirer. Pourquoi ? Parce que l’être humain est irrésistiblement attiré par l’inconnu. Nous avons peur de la mort, mais nous voulons la comprendre, l’apprivoiser. Le Ouija offre l’illusion d’une réponse simple, immédiate, accessible à tous.

Il y a aussi le goût du frisson. Comme on regarde un film d’horreur ou on monte dans un grand huit, on joue avec ses limites. Mais contrairement au cinéma, où il suffit d’appuyer sur « stop », ou au manège, où l’on sort après trois minutes, le Ouija laisse des traces bien après que la séance est terminée.

Pour les adolescents, c’est aussi un défi. Jouer au Ouija, c’est braver un interdit, se prouver qu’on n’a peur de rien. Mais combien de ces jeunes se retrouvent, quelques jours plus tard, incapables de dormir la lumière éteinte ?

Peut-on s’en protéger ?

On entend souvent des règles censées limiter les risques : ne pas jouer seul, toujours dire « au revoir », utiliser des bougies blanches ou de la sauge, prier avant et après la séance. Ces précautions peuvent aider, mais elles ne garantissent rien. Car une fois la porte ouverte, aucune formule magique n’assure qu’elle se refermera.

La vérité est simple, et elle ne plaira pas à ceux qui espéraient une recette miracle : le seul vrai moyen d’éviter les dangers du Ouija est de ne pas y toucher.

Mon regard de médium

Dans mon travail de voyant et médium, j’ouvre et referme des canaux. Je communique avec des esprits, mais je le fais avec une préparation, une discipline, et des protections spirituelles. Je sais refermer ce que j’ouvre.

Ce que je reproche au Ouija, c’est qu’il met ce pouvoir entre les mains de personnes qui n’ont ni l’expérience ni les protections nécessaires. C’est comme donner un scalpel à quelqu’un qui n’a jamais étudié la chirurgie. On ne s’improvise pas chirurgien. On ne s’improvise pas médium non plus.

Humour noir, mais avertissement sérieux

On peut en rire, bien sûr, et je crois que l’humour aide parfois à faire passer les messages les plus graves. Le Ouija, c’est un peu comme Tinder, mais pour les esprits : vous espérez trouver un ange gardien, et vous tombez sur un démon collant. C’est comme laisser votre connexion Wi-Fi ouverte : vous rêvez que seul votre voisin sympathique s’y connecte, mais c’est le voisin louche du troisième qui en profite. C’est comme cueillir un champignon inconnu en forêt : parfois délicieux, parfois mortel.

Ces images prêtent à sourire, mais elles traduisent une réalité sérieuse. Le Ouija ouvre une porte, et vous n’avez aucun contrôle sur ce qui va passer de l’autre côté.

En clair...

Le Ouija attire parce qu’il répond à notre curiosité la plus profonde : savoir ce qu’il y a après la mort. Il amuse parce qu’il donne des frissons. Mais il est dangereux, car il ouvre un canal sans filtre. Les conséquences peuvent être minimes, comme un cauchemar passager, ou dévastatrices, comme une hantise persistante ou une oppression spirituelle.

Mon conseil est clair et définitif : ne jouez pas avec ça. Si vous voulez explorer l’invisible, faites-le accompagné, protégé, avec quelqu’un qui sait ce qu’il fait. Et si vous voulez vraiment vivre des émotions fortes un samedi soir, regardez un bon film d’horreur. Celui-là, vous pouvez l’arrêter quand vous en avez assez.

Et si vous cherchez à invoquer des esprits, choisissez plutôt un bon spiritueux. Au moins, il ne vous hantera que le temps d’une gueule de bois, et vous ne risquez pas de retrouver un démon installé dans votre salon.

Karl Stephane